Dr Nico P. Swartz
Dans l’histoire de Rome, la période 133-131 av. J.-C. est marquée par des révolutions violentes, des troubles politiques et des luttes intestines, uniques en leur genre, par leur férocité fratricide et néfaste. La révolution était dirigée contre une aristocratie au pouvoir, qui fondait sa position privilégiée sur la propriété des terres agricoles et la connaissance des lois en vigueur. Afin de maintenir sa suprématie, l’aristocratie cultivait délibérément une autorité centrale faible dans l’État. L’État fonctionnait par l’intermédiaire d’officiers élus chaque année – des membres de la noblesse qui devaient rendre des comptes à leurs pairs. La révolution se déroulait naturellement dans les domaines économique et politique, mais elle prit bientôt un caractère militaire lorsque l’impatience révolutionnaire ne put plus être réprimée. Dans le domaine économique, les tentatives des Gracques, à partir de 133 av. J.-C., de limiter la propriété foncière de la noblesse rencontrèrent un succès limité, mais la réaction brutale et autoritaire de l’aristocratie sénatoriale libéra des forces qui contribuèrent matériellement à la conflagration qui engloutit Rome au siècle suivant. Dans le domaine juridico-politique, où le droit était une science ésotérique étroitement gardée par la noblesse, Servius Sulpicius, professeur de droit par excellence, chercha à arracher à la noblesse ce monopole de l'enseignement juridique, entre autres, en introduisant des idées philosophiques grecques. Ses efforts assurèrent la systématisation et finalement la codification et l'immortalité du droit romain, mais ne donnèrent pas de résultats tangibles suffisants pour le moment. En fin de compte, l'initiative fut prise par des chefs militaires dont le zèle à abattre des hommes ne peut être égalé que par un Gengis Khan, un Robespierre et un Trotski. L'aristocratie fut anéantie et remplacée par un souverain unique, sans aucune restriction dans ses pouvoirs, appelé par euphémisme princeps.