Ladeveze V, Farhat R, El Seedy A et Kitzis A
La mucoviscidose est la maladie rare la plus fréquente dans la population caucasienne. Cette maladie héréditaire récessive grave est causée par des mutations du gène CFTR (Cystic Fibrosis transmembrane conductance Regulator). Ce gène code pour une protéine exprimée au niveau de la membrane apicale des cellules épithéliales. Les mutations sont classées en six classes en fonction de leurs effets et de la gravité du phénotype. La mutation F508del est la mutation la plus fréquente du gène CFTR ; elle induit un mauvais repliement de la protéine bloquant ainsi sa maturation, sa localisation membranaire et au final, sa fonctionnalité.
Cette étude combine une approche clinique et des analyses cellulaires à plusieurs niveaux pour déterminer les conséquences physiopathologiques de la mutation c.1392G>T (p.Lys464Asn) CFTR exon 10, détectée chez un patient atteint de mucoviscidose avec une délétion de décalage de cadre de lecture en trans et une TG(11)T(5) en cis. Dans un premier temps, l'épissage a été étudié par des expériences de minigènes, avec différents allèles TG(m)T(n), et par des extraits d'ARNm de cellules nasales pour déterminer les conséquences de c.1392G>T. Ensuite, le traitement de la protéine p.Lys464Asn a été évalué, in cellulo, par des analyses de western blotting.
La mutation c.1392G>T affecte l'épissage de l'exon 10 en induisant sa suppression complète et en codant un transcrit à décalage de cadre. Le polymorphisme TG(11)T(5) augmente les effets de cette mutation sur l'épissage aberrant, suggérant l'importance de l'allèle complexe. L'analyse de l'ARNm obtenu à partir de cellules épithéliales des voies respiratoires maternelles a confirmé ces résultats in cellulo. Au niveau protéique, la protéine p.Lys464Asn n'a montré aucune forme entièrement glycosylée.
Ainsi, la mutation c.1392G>T seule ou associée au tractus poly T a révélé des impacts évidents sur l'épissage et le traitement de la protéine CFTR. L'allèle complexe c.[T(5); 1392G>T] contribue au phénotype CF en affectant l'épissage et en induisant un défaut grave de traitement. Ces résultats démontrent que la classification classique des mutations CFTR n'est pas suffisante : des études in vivo et in cellulo d'un éventuel allèle complexe chez un patient sont nécessaires pour fournir une classification correcte des mutations CFTR, des conseils médicaux adéquats et des stratégies thérapeutiques adaptées.